Le 27 avril, le Parlement du Climat a organisé une table ronde parlementaire sur rôle du secteur privé dans le développement des mini-réseaux d'énergie renouvelable, en collaboration avec l'Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) et avec le soutien de la Commission européenne (DG INTPA). Deux expertes de ce sujet, Camille André-Bataille, co-fondatrice et CEO de ANKA-Madagascar, et Irene Calvé Saborit, co-fondatrice et CEO de Sunkofa Energy, ont présenté le travail de leurs organisations respectives, qui fournissent aux populations des solutions hors réseaux d'énergies renouvelables en mettant particulièrement l'accent sur l'utilisation productive de l'électricité.
Pour atteindre notre objectif de développement durable n° 7 visant à garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes à un coût abordable d’ici 2030, les énergies renouvelables joueront un rôle crucial en Afrique. L’Afrique est le continent qui possède de loin les meilleurs niveaux de rayonnement solaire au monde, ainsi que d’importantes ressources éoliennes et hydroélectriques. Le secteur privé, qui peut faire preuve d’une plus grande flexibilité et rapidité d’intervention que le secteur public, constitue une solution parallèle aux efforts des États qui étendent les réseaux électriques nationaux, en permettant à des territoires plus reculés d’accéder rapidement et à moindre coût à l’électricité sur des réseaux indépendants. Nos deux expertes ont insisté sur la nécessité de ne pas opposer les miniréseaux aux réseaux nationaux. L'une des principales préoccupations des promoteurs de projets est que si le réseau national arrive dans le village où ils prévoient d'investir, ils risquent de ne plus être rémunérés et de perdre leur investissement initial. Mais en réalité, les miniréseaux peuvent être une solution de pré-électrification, compatible avec le réseau national, et qui peuvent y être reliés à plus long terme. Il est donc important de stipuler et de mettre au clair, au stade initial du projet, les conditions et les exigences de toutes les parties en cas d’arrivée du réseau national dans le village.
ANKA Madagascar et Sunkofa Energy sont des acteurs qui jouent un rôle important dans le développement d’écosystèmes sociaux et économiques plus résilients, en concevant l’électricité comme un levier, et non pas comme une fin en soi. Bien plus que le simple fait d'allumer une lumière, l’électricité permet aux communautés de développer des activités économiques génératrices de revenus, et de mettre en place des services. Nos expertes ont insisté sur l’importance de la création de valeur ajoutée autour de l’accès à l’électricité pour créer de l’emploi et un développement économique et social plus pérenne. Dans le contrat de concession des développeurs de miniréseaux, il est donc crucial de définir non seulement quel pourcentage de la population devra être reliée au réseau, mais également un niveau de services minimum, en s’assurant de fournir de l’électricité aux acteurs productifs tels qu’un soudeur ou un charpentier, et à des machines productives comme les moulins à grains, les appareils pour la transformation agricole, l’irrigation, la cuisson électrique ou encore la conservation à froid. Cette approche permet non seulement d’avoir un impact local plus fort auprès des populations bénéficiaires, elle permet également de mieux rentabiliser le modèle économique des miniréseaux, en stimulant la demande.
Camille et Irene ont prodigué à nos parlementaires des conseils pour faciliter et accélérer le développement des miniréseaux en zones rurales, et ainsi permettre à leurs administrés de bénéficier d’une meilleure qualité de vie et de davantage d’opportunités économiques génératrices de revenus. La majorité des pays africains disposent déjà de cadres réglementaires, mais ceux-ci ne sont pas remis à jour assez régulièrement sur la base de l’évolution des marchés, de l’offre, des besoins, ou des stratégies politiques du moment. Les parlementaires ont donc un rôle important à jouer en facilitant le dialogue entre toutes les parties prenantes, pour adapter et rendre plus favorables les cadres existants en fonction des retours d’expérience du marché et des contraintes du secteur financier. Selon nos expertes, le défi principal rencontré par les acteurs économiques des miniréseaux reste toutefois l’accès aux financements. Les acteurs financiers prêts à s’engager dans des projets de miniréseaux sont très peu nombreux, et les développeurs se retrouvent obligés d’accepter un nombre important de contraintes. D’un côté, les investisseurs veulent maximiser leurs marges en minimisant les risques, de l’autre, les autorités publiques veulent protéger les citoyens en leur assurant des tarifs abordables, et enfin, les banques de développement se montrent peu flexibles en imposant des contraintes importantes pour accorder leurs subventions.
Pour concilier tous ces intérêts divergents, il est impératif de renforcer la bancabilité des projets de miniréseaux, en créant un climat de confiance. Les législateurs peuvent encourager leurs gouvernements à montrer de la bonne volonté pour rassurer les acteurs financiers, par exemple via des incitations fiscales exonérant les droits de douane sur les importations d’équipements pour l’électrification, ou en accordant des facilités de paiement des taxes pour les sociétés du secteur. Ils peuvent les pousser à établir des feuilles de route détaillant avec précision les objectifs du pays et les stratégies à mettre en place pour les réaliser, afin de donner au secteur privé une meilleure visibilité sur les perspectives de pénétration du marché. Enfin, les parlementaires peuvent travailler sur l’anticipation des besoins énergétiques. Évaluer correctement les besoins des populations est un travail important à effectuer en amont, car s’ils sont sous-estimés, la fourniture d’électricité ne pourra être suffisante pour exploiter tout le potentiel productif d’un village. Et s’ils sont au contraire surestimés, le projet ne sera pas rentable pour les développeurs et risquera la faillite. Tous les instruments destinés à rassurer les investisseurs, et à alléger une partie du risque, devraient être utilisés par les parlementaires pour attirer plus d’acteurs du privé et ainsi accélérer l’électrification rurale.
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